Sortir du carré

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« Au secours Papoun, mon oral de Sciences-Po Grenoble me demande de préparer six textes, et je ne comprends pas bien celui de Bruno Latour, où veut-il en venir ?… (N.B. « Êtes-vous prêts à vous déséconomiser ? », article de BL paru dans AOC, le 1er juin 2020.)

« OK Iris, regardons ça ensemble. Bruno est un sociologue des sciences que j’ai bien connu il y a trente ans, je l’ai même quelques fois invité pour des débats à la Maison de la Culture de Grenoble, ou à la Villa Gillet ; il travaillait à l’époque sur l’énonciation scientifique, en se demandant ce qui permet à une proposition issue du laboratoire de s’imposer, avec l’aide de quels acteurs cachés (qui peuvent être des outils, des personnes-relais, des médias ou une institution)… Quel réseau (fait à la fois de gens et d’objets) soutient le raisonnement, qui suffit rarement par lui-même ; comment le scientifique trouve-t-il des alliés pour gagner la bataille de la vérité dans le tournoi permanent des thèses et des propositions ? Pour comprendre cela, il analysait par exemple le rôle des bibliographies, essentielles aux publications savantes, ou le contenu des notes placées en bas de page et en petits caractères… Aujourd’hui, Latour est devenu l’un des champions intellectuels de la cause écologique, pour laquelle il conseille je crois Yannick Jadot, mais il inspire surtout de jeunes chercheurs ou philosophes comme Baptiste Morizot (l’auteur de Manières d’être vivants). Et il est co-signataire du Deuxième manifeste convivialiste, auquel j’ai moi-même souscrit. De quoi s’agit-il ?

« De ne pas tomber dans le panneau de l’homo oeconomicus, cette fable qui veut nous faire croire que l’homme est un calculateur rationnel de ses profits et pertes, toujours mû par la recherche de son intérêt individuel… Faire de l’économie le pilote ou la visée première de nos activités semble une représentation particulièrement rabougrie de l’humanité. Une réduction qui a surgi tardivement, et localement, dans quelques pays occidentaux avec la victoire du capitalisme, et la définition des individus comme producteurs et consommateurs de biens et de services dotés d’une valeur marchande, tarifée. En fait et c’est heureux, nous ne sommes pas toujours animés par la recherche du profit maximal, et ces activités elles-mêmes qu’on isole comme économiques ne fonctionneraient pas aussi bien si elles n’étaient soutenues par tout un pan d’initiatives ou de compétences non-marchandes, et que le marché ne contribue pas à créer, telles que l’honnêteté, une bonne culture générale, un sens du devoir ou de l’altruisme, ou l’éducation donnée par les parents, en bref toute une formation morale et intellectuelle qui ne vise pas proprement le secteur dit « économique », ni n’en provient, mais qui contribue indéniablement à ses succès.

« Réduire, formater, simplifier nos relations au monde et les relations des hommes entre eux par une raison ou un cadre strictement économique revient à entériner une forme de barbarie. Et à ignorer le très riche tissu relationnel du monde social, ou au-delà (et comme dit Morizot) de nos manières d’être vivants, qui n’ont pas attendu le capitalisme pour se développer et gagner en richesse, alors que celui-ci serait plutôt pour elles un redoutable facteur d’appauvrissement.

« Notre productivité, dont nous nous montrons parfois si fiers, consiste aussi à extraire de notre vie sur Terre des composants non renouvelables, et à briser quantité de maillons essentiels à la biodiversité ; et c’est pourquoi, face au terme de production, Latour oppose et valorise celui de subsistance. D’où provient la « valeur », concept essentiel à toute économie, sinon d’une capacité que nous avons en commun de subsister en nous soutenant, vivants et non-vivants, les uns par les autres ? En entretenant un riche maillage de boucles vertueuses et de co-dépendances entre lesquelles la vie s’entretient et renaît ? Une vie qui échappe largement a    u fragile petit moi individuel et à nos existences étriquées, pour s’étendre par boucles de plus en plus larges entre les races, les espèces, les genres et les continents…

« La raison économique nous enferme, nous mutile. Il est essentiel de sortir de ce cadre ou de ce carré, en direction par exemple de l’écologie, qui prend en considération nos contextes vitaux, et les conditions de notre survie sur cette Terre. Rappelons-nous toujours que l’écologie c’est l’économie au sens large, replongée, réinsérée dans nos formes de vie.

« Or l’expérience ou l’épreuve récente de l’épidémie de Covid a peut-être contribué à cette prise de conscience, écrit Latour, en nous montrant en pleine lumière que « quelque chose cloche dans notre définition du monde par l’économie ». Non seulement celle-ci ne constitue pas l’alpha et l’oméga des activités humaines, mais par exemple les actions qui relèvent du soin méritent une meilleure considération (et salaire) que celles de la production proprement dite, qui les refoulent traditionnellement dans l’ombre. Que seraient les « premiers de cordée » sans le secours discret des « premiers de corvée » ? Que feraient, dans le domaine de la santé, les spécialistes de la guérison (de la cure) sans les auxiliaires de tous ces soins qu’on appelle aussi le care ? Comment le chirurgien se passerait-il de l’infirmière ? Ou les réseaux de la grande distribution et nos hyper-marchés des caissières et des éboueurs, professions obscures et mal payées ? La pandémie a révélé l’importance nouvelle, ou sous-jacente, de tous ces métiers du soin, enfin sortis de l’ombre. Mais cette prise de conscience contribuera-t-elle à changer nos hiérarchies sociales, mentales, relationnelles ? À comprendre un peu mieux où sont et d’où viennent nos vraies valeurs, les ressources par lesquelles ensemble nous existons ? Ou, dit Latour, subsistons ?

« La substance de la vie nous déborde infiniment ; or elle nous est donnée, comme notre naissance, et non produite techniquement ; et toutes les blessures que nous lui infligeons en croyant nous enrichir ne se répareront pas. Comme le disait si bien Camus dans son discours de réception du prix Nobel à Stockholm, anticipant sur cette prééminence ou noblesse des arts du soin, il ne s’agit plus tellement de changer notre monde que d’empêcher que celui-ci ne se défasse. Plus que jamais aujourd’hui, soixante-cinq ans après cette parole, nous en sommes là.

« Nos formes de vie déborderont toujours de tous côtés l’économie, décidément bien mesquine et rabougrie si elle consiste à traiter les vivants, et leurs niches écologiques, comme autant de ressources à extraire, à exploiter ou à transformer. Et ces formes de vie ne se réduiront jamais aux petits jeux de la production, de la consommation et de l’appât du gain, nos vraies richesses (titre d’un ouvrage de Jean Giono) sont ailleurs.

« Mais pour conclure, éclairons le titre de ce billet, tiré d’un problème classique : comment relier en quatre coups d’une ligne brisée, sans lever la plume ou le crayon, les neuf points du carré ci-dessus ? C’est impossible tant qu’on s’enferme, mentalement, dans la forme donnée (mais qui n’est pas imposée) du carré ; c’est très facile en prenant du recul, et en imaginant d’en sortir ! Et cette solution est une conversion, nous ne risquons plus de jamais l’oublier.

De même, écrit Latour en citant le si beau film (commenté voici longtemps ici même) The Truman Show, jamais on ne fera rentrer son gentil héros joué par Jim Carrey sur le plateau de tournage, une fois qu’il a pris conscience de l’énorme supercherie qui a remplacé sa vie par une série de trucages ! Dès lors que Carrey est sorti du carré…

14 réponses à “Sortir du carré”

  1. Avatar de Kalmia
    Kalmia

    Bonjour!

    Ah, ce sacré Daniel! Avec lui on passe de l’isoloir au carré… pour mieux en sortir.

    Il nous oblige quelque part…Comme d’habitude!

    Dans le discours du Nobel qu’il aime à citer, on trouve ces mots qu’il ne messied pas de reproduire ici :

    « Qui, après cela, pourrait attendre de lui des solutions toutes faites et de belles morales ? La vérité est mystérieuse, fuyante, toujours à conquérir. La liberté est dangereuse, dure à vivre autant qu’exaltante »

    Imaginons la petite-fille, éprise de liberté et résistante à sa manière, s’en aller recta du côté d’Issy-les-Moulineaux pour attendre au sortir du studio de la chaîne de télévision, Monsieur M B C, l’érudit québecois qui sait dire ses quatre vérités à qui veut l’entendre, afin de l’aider dans sa réflexion sur un texte de Bruno Latour.

    Il en serait tout baba le papy et sans nulle conteste particulièrement fier de l’audace de sa petite-fille.

    Elle a choisi le grand-père et icelui connaît l’art de ce titre, alors tous les espoirs sont permis, palsambleu!

    J’ai sous les yeux une réponse de Bruno Latour répondant à « La Croix » : « Dans l’Église, il y a eu un oubli du rapport au cosmos, une indifférence partagée sur la question de l’écologie, depuis le XVII è siècle »

    La France paysanne en sait quelque chose…

    Et maintenant une question de Bruno Latour à Michel Serres, dans l’un de ses entretiens :

    « Mais nous sommes toujours dans le même monde de la nécessité. Comment pourrions-nous en sortir? »

    Nous voici derechef avec l’allégorie de la République et nous ne quittons pas la villa du film de Peter Weir.

    Et le maître qui en connaît un rayon sur les vices et les vertus des cercles, de nous proposer un sacré carré au risque de mettre en ébullition les neurones des théoriciens des SIC. Plus d’un, j’imagine, saurait obtenir un carré en ne bougeant qu’une seule allumette sur quatre allumettes disposées en croix!

    Comment ne plus s’abîmer dans le cercle de la répétition du même? Telle est la question, mon Capitaine.

    La quadrature du cercle, si chère à M.Heidegger, vous connaissez? Et l’anagramme de « La quadrature du cercle »?

    Réponse : « Calcul rare du détraqué ». Si vous avez une minute à vous, ouvrez un dictionnaire et voyez le sens du mot « traqué ».

    Et ajoutez par devant le préfixe « dé » qui signifie un contraire.

    Au delà des selfies ridicules, des sourires de charme et de la danse télévisée avec l’Europe pour petits riches d’Erasmus, entrons dans la ronde heureuse des enfants rêveurs qui ne s’en laissent pas conter.

    Bonne chance à vous Iris et bonne crémaillère à votre Papounet aux semelles de vent.

    Kalmia

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Etourdissant commentaire chère Kalmia, je ne sais si ma petite fille le lira, ni si elle y déchiffrera des allusions qui me demeurent opaques, mais c’est en général le charme de vos interventions, il faut bien conserver quelques secrets pour survivre, palsambleu !…

  2. Avatar de Jacques
    Jacques

    Bonsoir!

    Que dire en effet de ce billet, du commentaire et de la réponse du maître?

    J’ai bien essayé de bouger une allumette, j’ai fait un 4 et quelque chose ressemble à ce nombre qui, somme toute, est le carré de 2.

    Mais là, que nul n’entre ici, s’il n’est que géomètre!

    J’ai retrouvé ce passage de l’ouvrage « Essais et conférences  » de Martin Heidegger :

    « La Quadrature est, en tant qu’elle est le jeu de miroir qui fait paraître, le jeu de ceux qui sont confiés les uns aux autres dans la simplicité. L’être de la Quadrature est le jeu du monde » (Fin de citation)

    Sauvons l’obscur, peut-être!

    Carrément méchant, jamais content, le bon peuple guidé par la liberté?

    En 1831, « La Liberté guidant le peuple d’Eugène Delacroix ». On nous a déjà dit l’anagramme :

    « Le gueux radine, l’étendard palpite, le ciel bouge » Les mêmes quarante lettres.

    Carrément méchante, jamais contente, la foule sentimentale qui court après les choses commerciales?

    Sortir carrément du cercle des braves gens pour suivre une autre route qu’eux?

    Le bon samaritain qui a pitié, sur son chemin était-il brave et honnête?

    Carrément humaine et raisonnable, peut-être…la réponse qui sort des sentiers battus.

    Jacques

  3. Avatar de Gérard
    Gérard

    Bonsoir!

    On chante, à cette heure, à Turin, et peut-être sous les projecteurs, quelque suaire pour distinguer les reflets d’une étincelle qui danse…

    Il y a peu, j’ai reçu des Éditions Robert Laffont, un bel ouvrage de plus de 500 pages, intitulé « Le maître et l’assassin ».

    L’auteur a mené l’enquête avec ardeur. C’est un livre bien écrit pour essayer de nous faire sortir du carré abject de la violence humaine.

    Peut-être pour y trouver au delà, un caret salutaire.

    Bien à tous

    Gérard

  4. Avatar de Kalmia
    Kalmia

    Eh bien, les amis, plus d’un dans sa carrée a dû chercher, peut être en vain, la signification du « caret » de notre commentateur dans leurs sacro-saints dictionnaires! Heureux ceux qui auront découvert ce graphème en signe de Victoire, palsambleu!

    Nous sommes bien loin du carré du module de la fonction d’onde de M.Born et Monsieur notre Maître n’en demande pas tant à ses lecteurs!

    Sans le moins du monde, vouloir troubler cette onde mystérieuse, redescendons sur terre, messires et gentes dames!

    Vous avez vu, nous avons au pays de la Dolce France où ce qu’il en reste, une nouvelle « première ministre », comme ils disent!

    Ils, c’est-à-dire toutes ces élites cravatées et bien payées au pouvoir, qui nous parlent dans le poste.

    Oncques, vous n’entendrez une telle appellation de la bouche du peuple, du petit peuple qui ne ressent pas en son for intérieur un tel barbarisme que Monsieur Régis Debray apparente à de la barbarie.(Médium, n° 42, page 181)

    Même si vous ne me lirez jamais, Madame le Premier Ministre, vous qui n’êtes point bornée, sachez qu’à l’intérieur des terres, il est des petites gens qui considèrent neutre la fonction et le masculin générique.

    En telle politesse de notre langue, plus d’une petite fille pourrait rêver…Madame le Premier Ministre.

    Kalmia

  5. Avatar de M
    M

    Bonjour!

    J’ai lu ce billet et les commentaires qui nous parlent de sortir du carré mais qui nous laissent toujours avec les marionnettes défilant le long de la paroi de nos petites vies, sans ne rien changer à nos conditions existentielles.

    Je pensais à tout ça, hier, dans ma voiture, sur une route départementale, en pleine campagne comtoise.

    Je m’en allai retrouver un ami paysan, à quelques lieues de mon prieuré, juste pour faire la causette.

    Icelui, à sa table installé me dit qu’il vient de recevoir des services de l’élevage une attestation relative à la détention d’animaux.

    Il n’a plus de bovins depuis quelques mois et il doit remplir le formulaire et renvoyer les boucles d’identification inutilisées datant de quelques décennies. Dont acte. Il me montre les documents et la lettre d’accompagnement. Elle est courte, précise avec un petit brin littéraire, afin de remercier la dame de l’administration pour la qualité des services et son écoute durant tout ce « temps d’élevage ». Il a même joint un RIB pour remboursement des boucles renvoyées, s’il y a lieu.

    De tous les groupements sanitaires d’élevage de France et de Navarre, je doute qu’un seul a reçu une lettre pareille.

    On sirote quelque boisson non alcoolisée au fond du jardin potager, sous une petite tonnelle où dans la haie de l’enclos attenant, s’envole un couple de ramiers.

    J’ai le sentiment que ce paysan retraité me cache quelque chose…Il ne me dit pas tout.

    Et je repars avec cette impression qui m’interpelle en mon for intérieur.

    Le soir même, je regarde sur la 3, le film dramatique « Petit Paysan » de Hubert Charuel, avec l’actrice Sara Giraudeau. Un film couronné de trois César, en 2018. A la fin du film, la télé éteinte, j’appelle mon ami paysan pour lui demander son avis sur le scenario.

    « Je suis en train de faire mes comptes et j’ai regardé machinalement, j’ai déjà vu ce film. Tu sais, c’est du cinéma et les acteurs font leur métier.

    Mais c’est toujours la même chanson et lancinante question : Comment réconcilier nature et culture?

    J’aurais dû te montrer, les quelques mots manuscrits échangés avec Anny Duperey, conservés là-haut dans une armoire ancienne.

    Nous devisions justement sur cette terrible question et elle était plutôt optimiste… »
    (Fin de citation)

    L’acteur sort de la ferme, regarde une vache dans le pré et s’en va vers l’inconnu…Et sur l’écran tombe le rideau!

    Dans la vie réelle des gens de l’agriculture, il a aussi des canapés pour regarder les fadaises pitoyables de la téléréalité.

    Pas toujours facile de sortir du tunnel et de suivre son chemin vers l’inconnu…sans caméra et sans distinction.

    Avec un peu d’imagination, on ne sait jamais! De ce terreau peut-être pourrait sortir et croître « le vivre-ensemble », comme disent les élites qui, sous l’acacia, pérorent à qui mieux mieux sur ce « luxe nocturne de la fantaisie ».

    « Lire est une route sur laquelle nous avançons » (Pierre Dumayet)

    A bientôt peut-être à la croisée des chemins!

    M

  6. Avatar de Kalmia
    Kalmia

    Bonjour!

    En ce jour férié d’Ascension, en république française, il ne messied pas comme dirait l’autre, d’élever le débat en essayant de contrecarrer le carré, avant la parution du prochain billet du randonneur, toujours lu avec intérêt et plaisir dans les chaumières de France et de Navarre.

    Je ne sais si tous les gens qui vont partir sur les routes en ce jour de fête chrétienne, vont ouvrir leur bible pour lire les versets du chapitre XVI de l’évangile de Marc, relatant la montée au ciel du « christ ressuscité »…

    J’ignore aussi si certains contribuables de ce pays éligibles à la prime « inflation » et qui ne l’on pas perçue, vont suivre, ce jour, les conseils du gouvernement : « Allez sur le site internet et faites une déclaration! » Seulement, la plupart de ces pauvres oubliés de l’administration n’ont pas Internet.

    L’un d’eux me disait, hier :

    « Ces gens du haut s’imaginent que l’on vit comme eux avec des écrans tout autour. C’est la culture de la ville et de son hégémonie qui nous est imposée et personne ne dit rien ou presque…Mais cette rupture ne date pas d’hier, je me souviens d’un vétérinaire loquace, en retraite, qui avait passé la nuit à la maison pour s’entendre monologuer, me disait à l’époque que pour un paysan, 4000 F de retraite par mois, ce serait bien et en tout cas, cela lui suffirait. Lui, il touchait 12000 F par mois. La profession vétérinaire en milieu agricole et rural est très présente au parlement. » (Fin de citation)

    Foin de ces plates considérations qui vont faire s’endormir nos chers vacanciers de l’Ascension, palsambleu!

    Contrecarrer le carré. Quésaco, bonnes gens?

    Déménager sans doute, autrement dit « faire le ménage »!

    Nomade et sédentaire en même temps, comment vivre tel paradoxe? Comment être ailleurs tout en restant chez soi?

    Comment vivre à Paris tout en étant dans sa province? Peut-être serait-on bien inspiré de relire la fable du rat retiré du monde en s’instruisant de la théorie de la relation de Michel Serres…

    Déménager, c’est faire travailler ses méninges, certes, mais quid, mon bon Seigneur, de nos ruminations intellectuelles?

    Un académicien a posé la question : « Le péché originel, késaco? » Tout de suite après, il écrit :

    « L’Assomption, j’étais pour. Quoi de plus beau qu’une femme qui, comme une fusée spatiale, s’élève dans le ciel en majesté? »

    Tiens, cela me fait penser à un correspondant ami, expert éthique au CNES, qui aurait, peut-être, en ce jour de fête, une vision d’appareillage pour élever notre culture humaniste jusqu’aux jardins du ciel, qui sait!

    Revenons à la question de notre gentil académicien qui ne nous propose plus de dictées à la télévision.

    (On observera que la variante « késaco », n’est pas retenue dans son « Intégrale », Le Livre de poche, 2006)

    Selon, un Nobel de médecine, la seule possibilité de rédemption à l’égard du péché originel génétique vient du pouvoir humain unique d’agir contre la sélection naturelle, autrement dit effacer la tache originelle ou, du moins, d’en contrecarrer les effets.

    En d’autres termes, pouvoir agir contre la sélection naturelle en surmontant notre propre nature.

    Pour trouver dans les ressources de notre esprit une sagesse qui n’est pas inscrite dans nos gènes, ce grand savant, envisage des options.

    Oui, d’accord mais au ras des pâquerettes, ça veut dire quoi au juste, chers amis qui lisez ce commentaire?

    Les gens rêvent d’ascension sociale et d’options sur la bagnole achetée à crédit. Du cul des vaches au bureau ministre, c’est la flèche de l’évolution…Nos élites ont proclamé la bonne nouvelle partout. Mais elles ne font pas de miracles! On connaît leurs harangues et voilà pourquoi votre fille est muette.

    L’enfant se noie et nous avons besoin d’une perche ou d’un brin d’herbe, comme salvateur promontoire.

    Élever la culture, c’est faire un choix (eslite), n’est-ce pas?

    En conclusion de sa « vraie-fausse confession »(dixit Le Point), l’académicien en question, écrit en italiques :

    « Seigneur, le monde a-t-il eu un commencement et sera-t-il sans fin? »

    Le professeur et l’artiste devant un tableau de Jérôme Bosch lui répondent par une belle anagramme de

    « La fin du monde est pour demain » :

    « Arôme fou d’un matin splendide »

    Je vous laisse à vos crédences et à vos armoires bien placées dans l’appartement, pour faire revivre nos souvenirs et s’envoler nos rêves.

    Bonne journée de fête.

    Kalmia

  7. Avatar de M
    M

    De l’Ascension à la Pentecôte.

    Je viens de trouver dans un blogue où il est question de l’écrivain Donatien Moisdon, ces deux commentaires qui parlent de sortir du carré.

    Peut-être intéresseront-ils quelqu’un…On ne sait jamais!
    Les voici :

     » Bonjour!

    Monsieur D.D, vous avez un sacré animateur, ne le changez pas!

    Excellente idée de proposer un tel thème d’actualité sous la houlette d’un auteur dont le nom contient dans ses lettres interverties les « dominos » qui disent la face explicite et la face implicite d’un travail considérable.

    La guerre est finie et le chanteur D.M s’en allait revoir sa blonde. Quelques années plus tard, la belle Sheila chantait la fin de l’école et bonjour la liberté!

    Aujourd’hui, on s’entretue en Ukraine et un ex-ministre et un député du Pas-de Calais se font attaquer dans la rue, ici, au pays de la dolce France ou ce qu’il en reste.

    Alors non, non, rien n’a changé? Que peuvent la voix, la plume, les romans à foison et les essais à n’en plus finir?

    Sortir du carré pour faire quoi, au juste? Voir le guépard courir à l’infini dans nos mornes plaines?

    Il y a sans doute dans le « bestial » du romancier quelque chose qui tient de « l’art choral des démons » dont – par hasard, évidemment – l’anagramme fait « Les Chants de Maldoror ».

    Connaissez-vous Armand Petijean, cité par Gaston Bachelard dans son « Lautréamont »? Il écrivait cette étrange et profonde phrase :

    « Philomène meurt non point du mal d’amour, mais du joli mal d’être une hirondelle ». L’homme meurt aussi d’être un homme…

    Alors comment réaliser totalement son imagination? Telle est bien la question et peut-être que notre romancier de talent nous donnera la réponse, un jour de chance…

    Demain plus de guerre et paix dans les cœurs, les familles et sur le monde…Mille colombes et des millions d’hirondelles s’envolant sur le regard des yeux des hommes devenus des enfants.

    Joli rêve et mon œil Ferdinand!

    Mais sait-on jamais…Que savons-nous de cet espace blanc, ce champ blanc du poète cosmographe?

    Dites-moi, Monsieur l’écrivain, pourquoi ce « blanc inconnu sous clé stricte » par ses vingt-six lettres permutées nous révèle que « l’inconscient est un lac obscur »?

    Pensez-vous que dimanche matin à 8 H 30, la sage femme de service à l’émission religieuse sur une chaîne nationale de télévision, va nous donner la réponse sans tomber dedans?

    Faut pas rêver, certes, mais c’est un droit… de rêver.

    Alors dans les urnes murrhines de l’imaginaire, on peut toujours donner sa voix.

    Quant au résultat…

    Bon dimanche de Pentecôte

    Posté par V… il y a 2 heures | [Recommander] Recommander | Répondre

    _ _ _ _

    Je veux bien vous croire mais il me faut voir et toucher ce « pas au delà ». Sinon rien.

    La littérature capable du trait d’union entre ciel et terre? Je sais bien que c’est la Pentecôte, mais quand même!

    Quant au département du Pas-de-Calais, je pense qu’il en comporte deux…traits d’union. A vérifier!
    Posté par H … il y a 2 heures |

    Fin de citation

    Oui, enfin des mots, toujours des mots!

    Et le souffle, l’esprit, en tout ça?

    Bonne fête de Pentecôte

    A bientôt, cher Daniel, et au plaisir de vous lire et relire dans votre nouveau « chez vous »

    M

  8. Avatar de m
    m

    Bonjour!

    Sortir du carré du temps, du temps qu’il fait, entre la pluie et le beau temps, autrement dit le temps météorologique…

    Sortir du temps des horloges, ce temps qui a valeur d’instrument pour le scientifique, le politique…

    Enfin le grand déménagement pour enfin, entrer dans le monde, celui du silence, en laissant sur l’étagère l’Atlas de Michel Serres, les thèses, colloques universitaires et les savants commentaires.

    En d’autres termes « se tirer du commerce des hommes et se faire la belle » comme autrefois peut-être le rat de la fable se retirant du monde.

    Seulement dans son fromage de Hollande, icelui retrouve le député du peuple qui vient vers lui, donc il n’est pas totalement isolé l’animal.

    L’Alceste de l’ère atomique Ettore Majorana, s’en est allé un jour, sans que personne ne le retrouve…Est-ce pour rejoindre cette quatrième dimension où l’auteur de La Dialectique de la Nature y voyait le séjour des esprits?

    « J’adorai la dimension à part » a peut-être dit quelque part le génial physicien sans savoir, peut-être, que ce constat entre guillemets est l’anagramme de « La disparition de Majorana » (Vérifiez, ce sont bien les mêmes vingt-trois lettres)

    Oui, mais comment sortir des écrans quand quelque chose incite votre moi à taper des lettres sur le clavier pour dire des choses qui seront lues ou pas lues? En quel écrin, au cœur de la nature, sous des ombrages incertains, découvrir émerveillé l’esprit de la lettre disparue?

    Il est question ici d’un monde silenciaire qui parle, nous parle…qui s’entend écouter dans une poétique de l’espace.

    Quid d’une telle assertion pour le commun des mortels qui achète sa baguette de pain, soigne ses douleurs articulaires et regarde le match à la télé?

    Il se moque éperdument de cet oxymoron et n’a que faire de toutes ces considérations intellectuelles qu’il ne lira jamais.

    Décider et partir vers un coin de paradis, nonobstant les orages du système.

    Est-ce bien raisonnable? Ce chemin a-t-il un cœur? Et si ce n’était qu’un mirage, une illusion?

    Seul, celui qui déménage peut répondre. Celui qui sort du carré pour oser chercher dans la prairie ce trèfle à quatre feuilles, au delà du Quarto littéraire d’un auteur heureux qui a fait de beaux voyages.

    Sentinelle, ouvre la barrière!

    m

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Merci, cher « m » ! J’ai souvent pensé pour ma part, dans le sillage notamment de François Jullien, que nos clôtures étaient inévitables puisqu’elles nous constituent. Par exemple, comment sortir de sa langue ? Comment parvenir à penser autrement ? En apprenant d’autres langues sans doute, lesquelles à leur tour… Comment jamais pénétrer le monde mental du Chinois, de la chauve-souris, ou de mon chat ? Pour ne rien dire de ma compagne…

  9. Avatar de m
    m

    …ET aussi de l’objet, cher interlocuteur!

    Quid des objets mentaux? On dit qu’ils sont « fragiles »(P-G de Gennes) alors autant les laisser en paix, autre façon peut-être de leur donner une âme.

    A part les vers du poète qui la force d’aimer, point de scalpel pour disséquer la belle, juste une histoire, n’est-ce pas? Et seul, peut-être, un analyste reconnu et considéré des effets des découvertes en physique quantique dans le champ de la philosophie, tel Bernard d’Espagnat par exemple, est en mesure de pouvoir éclairer un lecteur qui veut savoir en matière d’espaces mentaux, étudiés en leur temps par G.Fauconnier et M.Turner parmi d’autres.

    Sortir de nos murs, du carré de nos habitudes du carcan de nos atavismes, pour aller vers la vraie vie, si chère à F.Jullien, ce n’est pas facile et comme dit l’autre, on peut toujours essayer…Au risque de notre conscience, comme titrait cet ami bénédictin que vous avez lu dans « Médium », cher randonneur.
    R.Enthoven et J.Perry-Salkow ont découvert dans les lettres permutées de « L’allégorie de la caverne, Platon »… »le réel vacant le long de la paroi ». Je pose la question à mon estimé interlocuteur : Est-ce par hasard? Je ne suis pas si sûr qu’il faille se contenter de la réponse du physicien qui trouve dans l’anagramme un sens caché du monde.

    Marie ! Ouvre la barrière – YouTube

    Sommes-nous si loin, dans la prairie, du trèfle à quatre feuilles qui clôt le « Carnet de route » de notre ami commun et si original où pose la « Sentinelle oubliée : tel qu’en lui-même le cours des ans le change »?
    Sans digression aucune, on se plaît à relire « Odile » et à retrouver R.Queneau parlant dans ce beau roman des « infrapyschistes » , d’un voyage en Grèce et de la vie simple et ordinaire d’un couple aimant, enfin constitué, qui recèle sans doute une vérité toute relative.
    De retour d’une fête au village, je lisais, hier soir, ce message de mon petit-neveu parisien d’origine lusitanienne qui me parle de son engagement dans la cité, des valeurs du travail, de la famille et de sa confiance dans le redressement du pays.
    Bon, il est l’heure d’aller voter…Point de paysan du Danube en vue ni de Cincinnatus dans les allées dorées de l’hémicycle bourbonien.
    Quant à celle de s’enivrer…
    ici-bas, l’horloge des anges nous la donnera peut-être…

    m

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Hélas cher m, je suis rentré hier de Paris, covidé et dans un état d’abrutissement que je ne souhaite à personne. Vivement une reprise avec vous sur ce blog…

  10. Avatar de Jacques
    Jacques

    Mon commentaire

    Nos meilleures pensées vont vers vous, Monsieur Bougnoux, et nous vous souhaitons tous en chœur, un très bon rétablissement.
    A bientôt avec la santé revenue.
    Jacques et les autres…

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Merci à votre joyeuse petite bande ! Au fond du lit, vos voeux me touchent et m’aideront à en sortir…

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À propos de ce blog

  • Ce blog pour y consigner mes impressions de lecteur, de spectateur et de « citoyen concerné ». Souvent ému par des œuvres ou des auteurs qui passent inaperçus, ou que j’aurai plaisir à défendre ; assez souvent aussi indigné par le bruit médiatique entretenu autour d’œuvres médiocres, ou de baudruches que je…

    Lire la suite

À propos de l’auteur

  • Daniel Bougnoux, professeur émérite à l’Université Stendhal de Grenoble, est ancien élève de l’ENS et agrégé de philosophie. Il a enseigné la littérature, puis les sciences de la communication, disciplines dans lesquelles il a publié une douzaine d’ouvrages.

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Les derniers commentaires

  1. Incroyable cher M. comme, au dernier mot de ce commentaire, vous faites sortir le lapin du chapeau… C’est de la…

  2. Bonjour ! Un sacré billet qui me rappelle la fin de « L’homme neuronal » de Jean-Pierre Changeux, citant Spinoza (Éthique, IV).…

  3. Merci mon cher Jacque de vous adresser directement à ma chère Julia ! Je lui signale votre commentaire, car les…

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  5. Bonsoir, amis du bogue ! On attendait l’argumentaire de Monsieur Serres. C’est fait et bien fait. Une invitation à la…

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