Tribulations d’une tribune

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Les réflexions du précédent billet, « Le débat est-il mort ? », ne sont pas tout-à-fait hors-sol, mais tirent pour moi leur urgence d’une péripétie qu’il faut raconter sur ce blog, à défaut d’un autre support qui l’accueille.

J’ai rédigé l’hiver dernier un livre de reconnaissance envers Woody Allen, intitulé Génération Woody (un titre dont je ne mesurais pas alors pleinement la pertinence) ; j’y examine dix-sept films (sur les cinquante de ce réalisateur), j’y passe en revue à travers dix-huit entrées transversales ses thèmes, ses obsessions ou ses manies, je termine enfin (ce n’est pas l’objet du livre mais il faut évidemment en parler) par « l’Affaire » qui l’oppose depuis 1992 à Mia Farrow. Et qui vient de rebondir cette année avec la sortie d’un « documentaire » de quatre heures, qui instruit de façon totalement unilatérale le procès à charge contre Woody.

L’idée m’est venue, fin juin dernier, de soutenir le placement de ce livre auprès des éditeurs (curieusement réticents) par la rédaction d’une Tribune, à l’occasion du Festival de Cannes ; j’y défends vigoureusement la cause de Woody, j’y démonte les mensonges de Mia en citant des faits, des témoignages précis, en appelant à un débat contradictoire et non grossièrement à charge comme celui du film… Quinze personnalités co-signent mon texte, dont Michel Ciment, Noëlle Chatelet ou Belinda Cannone. Je l’expédie fièrement, ainsi richement paraphé, au service des débats et forums de La Croix, qui à ma grande surprise me le retourne avec des excuses entortillées : l’affaire est compliquée, on ne peut pas juger… La platitude des raisons fournies par le journal, au regard d’un argumentaire précis et documenté, me consterne. Je l’envoie au Monde, qui se déclare « très intéressé », l’accepte pour les pages numériques du monde.fr, et me demande de patienter. Très heureux et confiant en cette parole, je patiente donc. Deux semaines s’écoulent, avec le Festival, plus de nouvelles ; je relance (prudemment pour ne froisser personne), on ne me répond pas. Et avant-hier tombe enfin ce refus : « Vous avez fait parvenir un texte au service Débats du journal il y a maintenant plusieurs jours ou plusieurs semaines. Comme vous l’avez constaté, nous n’avons pu, et nous ne pourrons pas, en assurer la publication. Nous vous présentons nos excuses pour ce manquement. En vous remerciant de votre compréhension ».

Quelle compréhension ? Qu’y a-t-il à comprendre devant cette absence flagrante de raisons ? Pourquoi ce retournement, ces tergiversations, pourquoi tant de frilosité ? Cette tribune n’est pas un brûlot ni une provocation, elle tente de rappeler calmement certains faits, et de rendre justice à l’un de nos plus grands cinéastes, victime d’un très inquiétant retour du maccarthysme, dont notre pays semble lui-même menacé. Avec cette plate prudence que m’opposent les journalistes, le capitaine Dreyfus aurait fini ses jours à l’île du Diable (s’il est permis de chercher si haut un antécédent à cette affaire) !

L’acceptation au Monde était passée, je crois, par la médiation de Jean Birnbaum, qui s’était déclaré entièrement d’accord avec nous. N’a-t-il pas placé lui-même en exergue de son excellent ouvrage, Le Courage de la nuance (2021), cette citation tirée de L’Etrange défaite de Marc Bloch : « Que chacun dise franchement ce qu’il a à dire, la vérité naîtra de ces sincérités convergentes » ? Une maxime à méditer par l’équipe du Monde des débats, qui ne semble guère lire leur collègue du Monde des livres…

J’ai, sur le conseil de quelques co-signataires inquiets comme moi de ces refus successifs, proposé notre Tribune à Marianne, dont nous attendons maintenant la réponse. Les mêmes me disent aussi leur pessimisme sur les chances du débat aujourd’hui, dans notre nouveau paysage médiatique (il faudra revenir dans ce blog sur cette affaire de génération). Un ami signataire m’écrit, plus particulièrement :

« Oui… le cas Woody est clivant et le consensus du politiquement correct actuellement en vigueur te place, nous place dans une marginalité de pestiférés à grelots. Tu n’avais pas vu venir ? Personnellement, je ne suis pas étonné du tout. C’était la sortie de la Tribune qui me paraissait plus que surprenante. La comparaison avec Dreyfus vaudrait plus explicitement pour Polanski, autre victime des mêmes délires organisés. Non, je ne vois pas vraiment quoi faire pour réactiver cette tribune. Chaque rédaction se défilera de peur de perdre des abonnés, de se faire dénoncer sur les réseaux sociaux, de devenir le mouton noir de la vindicte populaire. C’est comme ça : tout est parti des mouvements féministes de chez nous en France, cela s’est dopé de bêtise au carré en transitant par les USA, avant de revenir en Europe pour nous être servi à la puissance trois par les zélateurs de la nouvelle morale genrée.  C’est aujourd’hui un mouvement aussi universel que la bêtise criminelle qui le porte : surveillance et délation, judiciarisation et suspicion,  haine des élites et passions tristes, rancœur et ressentiments envers les créateurs, obsession du nivellement, culte de l »autoflagellation et obsession de la faute, langage élimé et perte progressive de la pensée rationnelle, disparition de l’esprit critique et intransigeance grandissante dans l’adhésion aux idées fixes… nous allons droit vers un désir généralisé de Charia et de société pénitentiaire. Le tunnel, sans petite lumière au bout pour le moment… »

Comme tu y vas, mon camarade ! Mais il est vrai que notre époque est basse, et que l’horizon du logos dans lequel toi et moi avons été éduqués s’est bien obscurci… Il faudra, sans tarder, reprendre ici l’examen de ce tournant capital. Et si la réponse de Marianne devait s’avérer négative, je n’aurai d’autre ressource que de publier notre texte (intitulé « Molière déjà avant Woody ») sur ce blog. J’en recopie ici seulement le dernier paragraphe :

« À voir Mia s’exhiber, rayonnante, aux côtés de Ronan ou de Dylan soi-disant abusée et (sur la photo) jeune mère enceinte, c’est, sous ce sourire éclatant de triomphe, celui des fake news chères à Donald Trump qui s’étale : à force de répétitions et en harcelant les réseaux, on impose ses propres « vérités ». Elle a réalisé le rêve de tous les tyrans, plier le réel à sa voix. Ce déni de justice, l’énormité du mensonge et sa propagation, dans ce milieu du cinéma prompt à confondre l’imaginaire avec le réel…, s’imposent à notre réflexion. Les signataires ci-dessous ne remettent pas en cause le mouvement Metoo, ils s’élèvent contre un amalgame fatal à l’un de ses créateurs les plus justement aimés. Pourquoi cette proximité du comique et du bouc-émissaire ?

En son temps déjà Molière, en épousant Armande la fille de Madeleine Béjart, fut accusé d’inceste par la cabale. De Molière à Woody, est-ce notre rire que le parti dévot extermine ? »

21 réponses à “Tribulations d’une tribune”

  1. Avatar de Gérard Fai
    Gérard Fai

    Bonjour!

    Tribulations d’un auteur au pays où ça cause beaucoup et où ça lit peu.

    On comprend, voire on compatit.

    Marianne et Gavroche ont-ils ce problème? Nenni! Ils n’écrivent point et, de ce fait, n’ont pas à se faire connaître.

    Et quand bien même, le petit peuple voudrait élever la culture dans la discussion, serait-il pour autant écouté?

    Peu de gens à la table des invités aux noces et le dialogue reste une galère vide. (?)

    Compréhension scientifique et conscience symbolique….Pour quoi faire exactement et en définitive?

    Rendre au sens commun?

    « La villa, le mari parfait, la télé » font une étonnante anagramme : « Le travail, la famille, la patrie »

    Et l’univers dans tout ça?

    Et nous, pauvres de nous, qui scrutons au loin, la poussière sur le chemin d’une chevauchée fantastique et salvatrice, sommes-nous bien raisonnables?

    Pour l’heure, je ne vois rien venir et l’herbe et le soleil cachent leurs couleurs.

    A votre longue-vue, capitaine/tribun abandonné!

    Gérard Fai

  2. Avatar de Rabino
    Rabino

    De la part du Le Monde ou La Croix , deux journaux d’opinion de qualité qui imposent leur moralel’une laïque l’autre catholique, et qui ont une éthique à géométrie variable ces refus ne me surprennent pas .
    Les meilleurs contre arguments gênent les vérités établies, et une certaine forme de bien-pensante ne tolère aucune contradiction.
    L’Inquisition est toujours parmi nous prête à éliminer les déviants.

  3. Avatar de JFR
    JFR

    Mon commentaire
    Générations

    « Il y a quelque chose de pourri dans le royaume du Danemark ». Rien ne va plus. Le langage sert-il encore à quelque chose ? Et les corps peuvent-ils encore se parler, se toucher ? Les affects, les sentiments, circuler, s’échanger ? En ces temps de Covid la méfiance est grande. Chacun devient un ennemi potentiel pour autrui. L’autre ne va-t-il pas nous apporter la peste, ou tout du moins la fièvre ? Et le vaccin lui-même ne va-t-il pas nous tuer, transformer notre génome ? Qui croire ? Ils disent tout et n’importe quoi. Faut-il croire les médias, les politiques, les philosophes, les savants ? Où est la vérité ? On ne sait vraiment plus à quel Saint se vouer…
    Voilà plusieurs semaines qu’un écrit circule entre nous, qui nous parle de Woody Allen, de la censure exercée contre lui, de l’impossibilité pour le cinéaste de tourner désormais un film dans son pays, de son livre Soit dit en passant (A propos of nothing, en anglais) qui n’a pu être édité aux États-Unis, refusé par le groupe Hachette avant d’être publié par Stock grâce à Manuel Carcassonne et à Jeannette Seaver. Depuis plusieurs semaines cet écrit soutenant le cinéaste, qui propose faits et arguments et qui sollicite la réflexion de chacun, attend de paraître mais ne rencontre de la part de la presse qu’esquives ou refus gênés. Au pays de la Liberté, et, comme l’on dit, des Lumières, on s’étonne, on s’inquiète. La presse est-elle devenue si frileuse, si soumise à la censure ou à l’opinion ? Aucun journal n’est-il plus aujourd’hui capable d’éditer le J’accuse de Zola ? La vague Metoo, la cancel culture, culture de l’annulation ou plutôt du bannissement et de l’ostracisation, la call-out culture, culture de la dénonciation, semblent répandre la terreur et ont changé nos mentalités.
    Le philosophe a l’habitude du concept, de l’argument, le droit fait appel à la logique et sait argumenter, on le sait sans même avoir recours à Max Weber. Que dire alors de ces mouvements irrationnels qui traversent la société et dictent les conduites d’un si grand nombre ? Irrational Man est le titre d’un film de Woody Allen précisément. On le savait, l’homo sapiens est aussi homo demens, nous dit Edgard Morin. Cette approche, cependant, est insuffisante et le changement de paradigme est plus profond qu’il n’y parait. Sans doute assistons-nous actuellement à un changement de conception qui dépasse nos analyses habituelles. Il ne suffit plus de dénoncer un nouveau maccartysme et de crier haro sur la censure pour convaincre les plus jeunes de nos arguments. Leur éthique a changé et leur vision des années 68 reste sévère. L’époque n’est plus celle de Woodstock et de nos combats pour la liberté sexuelle. Cette liberté-là, pourtant acquise par nos efforts et nos engagements, n’est plus envisageable lorsqu’elle conduit aux pires excès des Weinstein et des Epstein (beaucoup de Stein). Ces porcs ont sonné le glas de la domination masculine (Bourdieu), ce sont les mêmes qui ont détruit la planète, disent les plus radicaux. Comment échapper à cet irrationnel ? Il n’y a pas que les réseaux sociaux qui changent les modèles de communication et les mentalités, il existe une véritable mutation des consciences et des esprits qui refusent de considérer le monde d’avant, au nom d’une transmutation des valeurs. L’esprit d’aujourd’hui est-il devenu nietzschéen ? Je laisse au philosophe le soin de traiter la question, mais il est vrai que par-delà les notions de Bien et de Mal, les notions de « nuisible » et « d’utile », prennent aujourd’hui toute leur valeur. L’avenir de la planète est en jeu et la génération d’aujourd’hui n’échappe pas au ressentiment. Ci-git l’amer, écrit Cynthia Fleury après Nietzsche et Max Scheler. On ne guérit pas si facilement du ressentiment quand la planète risque de disparaitre et que les anciennes générations sont tenues pour responsables.
    La génération actuelle semble imperméable à nos arguments, elle est l’expression d’un monde en mouvement. Nous sommes à l’ère des « savoirs situés ». Celui qui parle compte davantage que le contenu du message. « Qui parle ? », disait Lacan en son temps en renvoyant le Sujet à l’inconscient. Nous sommes loin de cette époque. « Qui parle ? », est aujourd’hui est une formule comminatoire. On est près de l’échafaud. Un blanc de plus de cinquante ans, hétéronormé, a peu de chance de se faire entendre. Dans les années 68, nos parents s’amusaient. « Cheveux longs, idées courtes », disaient-ils. Quelles idées fortes pour le monde de demain ?

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Beaucoup de grain à moudre cher JF, ou comme on dit du pain sur la planche pour un prochain billet !

  4. Avatar de MGL
    MGL

    Bonjour en ce dernier jour de juillet deux mille vingt et un!

    Mais qui est au bout du bout du bout du fil? Qui lira ce commentaire et va l’oublier tout de suite?

    Monsieur J-FR ? Monsieur Rabino? Frère Jacques sonnant les matines ou Madame Cécile épongeant l’eau de son sous-sol inondé?

    Mystère. Et comme le pain est sur la planche, autant se le mettre sous la dent (quand on en a – des dents!)

    Fin du débat? Tribulations d’une tribune d’un professeur émérite! Tribulations d’une tribune de militaires en retraite!

    Chacun a le droit de s’exprimer : le citoyen propose et dispose ensuite le « quatrième pouvoir » qui a ses rasons de dire oui, de dire non…

    Du sujet éclaté, les gens s’en moquent éperdument…Alors les malheurs de Woody sont les cadets de leurs arias, mon bon Professeur!

    D’une certaine idée de la France qui tombe dans l’abîme, bof, on ne va pas en faire une rougeole!

    Et les maladies de l’âme en tout ça, mes amis? Point de vaccin en vue pour « motiver » le genre humain aux prises à ses caprices et à ses habitudes.

    Incliner, bifurquer, ce n’est pas la voie choisie, décidée, de Monsieur Tout- le-monde. Et que pouvez-vous, que pouvons-nous y faire, mes bons Seigneurs?

    Dans un milieu – qui n’est pas le vôtre – où l’on n’écrit pas aux journaux pour « paraître » et qui n’en est pas moins indifférent à ce qui se passe, une autre approche – sauvage sans doute – qui questionne sur la question de savoir quelle est la bonne question qui peut faire question là où l’on est censé posséder la réponse, a peut-être ses chances d’aboutir, si tant est que l’on soit bien équipé en matière « visionnelle », pour employer le mot de notre président, qui fait s’exclamer le passant, rue du faubourg Saint-Honoré : « Quel superbe Africain! »(anagramme de « République française »)

    Mais que peut faire un sorcier vaudou couronné de fleurs en Polynésie? Et l’Apollon dans son Musée des sciences qui pose la question sur le pourquoi du verbe?

    Si dans votre jardin, l’aiguail matutinal a déclos la robe pourpre de la fleur aux quatre lettres, puissiez-vous, sans tambour ni trompette, la porter à votre bouche pour embellir et embaumer le temps qui court. Pourquoi pas?

    M G L

  5. Avatar de Kalmia
    Kalmia

    Cher M G L

    Bien lu votre commentaire pour le moins fleuri.

    Merci de me donner l’occasion de vous répondre.

    Ne vous étonnez donc pas si nous ne sommes pas lus!

    Il faut d’abord comprendre vos allusions et ce n’est pas simple pour les lecteurs qui ne connaissent pas vos auteurs.

    Permettez-moi de préciser pour une plus grande lisibilité de votre propos, en accord avec ce qui fut convenu entre nous, en colloque privé.

    Sur les Muses de la science , voir Alliage n° 44 de septembre 2000 (Jean-Marc Lévy-Leblond)

    Et « La culture scientifique, pourquoi faire? » Alliage n° 73 mars 2014 (Jean-Marc Lévy-Leblond),

    sans oublier la référence voilée au livre d’Angelus Silesius « La rose est sans pourquoi ».

    La fleur en quatre lettres, anagramme de « oser »et de « Eros » est la rose, tout simplement, enjolivée par Pierre de Ronsard.

    Bonne fin de journée et vive le mois d’août!

    Et ri et ran, ran pa ta plan!

    Kalmia

  6. Avatar de Cécile d’Eaubonne
    Cécile d’Eaubonne

    Curieuse imagination, monsieur MGL … ai-je parlé sur ce blog de sous-sol inondé ? Sauf à un certain ami du Poitou, bien peu discret dans ses échanges épistolaires. Chacun ses malheurs depuis la vache qui avale de travers, l’eau de l’Oise qui déborde et s’en va vagabonder en de multiples nappes phréatiques ingouvernables.

    Et faut-il évoquer les feux de forêts attisés par des vents violents que promet monsieur Météo pour ce 1 août, dans le Sud de la France ..

    Selon moi, le journal La Croix n’a pas pour vocation d’entrer dans une querelle contre ou pour Woody Allen. Le récit d’un film rejoint plus ou moins l’intérêt et l’imaginaire du spectateur. C’est une liberté individuelle à assumer. La crispation que représente un Gérard Depardieu dans sa vie ordinaire en est l’illustration, quand sur les écrans, c’est un comédien génial. Alors, sa vie privée m’indiffère . Et de fait, après toutes les explications pour défendre Woody Allen, je n’en comprends pas davantage le but final. Sauf à entendre le résumé d’une souffrance familiale causée par une femme blessée qu’elle transforme en haine destructrice. Le but … qu’il poursuive son œuvre. Qui en tient la clef ?

    Auriez-vous la dent longue et rageuse, Daniel, vis à vis du journal La Croix en le stigmatisant de «  parti de dévots ». Avis à vérifier … injuste très sûrement.

    Voyons désormais l’avis circonstancié de Marianne. Peut-être une rubrique dans Médiapart ou mieux une place plus importante dans Télérama, à la parution hebdomadaire.

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Je ne vous suis pas du tout, Cécile ! Ce n’est pas une question de « vocation », le journal La Croix, comme Le Monde placés devant cette tribune, renâclent à rectifier la grande injustice médiatique faite à Woody Allen par les réseaux sociaux. Autrement dit, au lieu de s’opposer à la rumeur ils la justifient, ce qui n’est pas le rôle de la presse (suivre, au lieu de s’informer et de chercher la vérité). Tout journaliste se trouve au carrefour, devant deux voies, va-t-il épouser le mainstream et caresser l’opinion publique (ici, Metoo), ou faire un effort d’investigation pour sauver d’une injustice un innocent ? Ma ou notre tribune apportait des documents, des témoignages précis que la rumeur ne veut pas entendre – et la presse suit la rumeur par intimidation devant les réseaux sociaux, ou suivisme devant la comédie jouée par Mia Farrow, qu’on préfère croire alors que deux commissions d’investigation indépendantes ont invalidé sa version – cercle vicieux, qui le rompra ?
      Quant au « parti dévot », cela ne concerne pas du tout La Croix, c’est la conclusion de la tribune, texte écrit avant la proposition faite à ce journal, et son refus. Je dois dire, puisque mon blog est hébergé par La Croix, combien ce refus m’a choqué, et que je ne le comprends toujours pas (ils ne me donnaient pas d’explication).

  7. Avatar de MGL
    MGL

    Mais c’est la Télévision, cette boîte à images où il faut payer une taxe pour les regarder, que nous avons pu voir les sous-sols inondés d’Eaubonne, chère Madame Cécile qui écrivez si bien.Rigoureuse et lucide.
    La référence était donc d’ordre général .
    A quand une politique sans « cravatés diplômés » (C’est une image!) qui ne bétonne plus et qui donne la main au paysan, au paysage et au pays?
    Faites passer le message à votre ami du Poitou, s’il est toujours dans ses verdoyantes prairies, comme vous dites…A toutes fins utiles!
    La rédaction de La Croix aime bien les vaches (et j’en ai la preuve)
    Ici, c’est un autre monde, vous savez!
    On fait des pieds et des mains pour effacer les vidéos et pour passer un article le gazetier doit insister plus d’une fois.
    Ce n’est peut-être pas de la discrétion…On dira une envie de liberté!
    Tout simplement
    Bon dimanche au bord de l’eau, si le temps dit!

    MGL

  8. Avatar de Cécile d’Eaubonne
    Cécile d’Eaubonne

    Cher Daniel
    J’ai plus de chance que vous puisque j’obtiens une réponse quand j’interpelle un journaliste de La Croix sur des vérités, selon moi, partielles ou erronées. Le re-writing devient vite mensonger …

    Bien sûr ayant déjà l’amitié pour vous qui … va jusqu’au malheureux cinéaste, je peux entendre votre indignation de ne pas être écouté. J’ai essayé de vous dire que la part culturelle du journal du jeudi, dans sa rubrique cinématographique me semblait bien étroite pour trouver la place que vous espériez.

    Puissiez-vous trouver une tribune à votre convenance !

  9. Avatar de m
    m

    Rewriting

    Mais vous avez de ces mots, vous, les parisiens!
    On a du mal à comprendre, pauvres de nous, gens des terres lointaines, pas très friands d’anglicisme et peu enclins à ces tournures qui nous font tourner la tête quand ce n’est pas en bourrique, palsambleu!
    Bel été à vous tous, lecteurs de ce blogue
    Avec le salut, devant vos Tribunes, de Spartacus du plancher des vaches.

    m

  10. Avatar de Jean Claude
    Jean Claude

    De la morale et du reste

    La morale évolue, elle est contextuelle à une époque. Aux valeurs séculaires du Bien et du Mal se substituent l’Utile et le Nuisible. L’esthétique et le beau changent de costumes. Ce qui était juste devient injuste. La jouissance aujourd’hui n’est plus se qu’elle était. Que dire de l’éthique de la joie de vivre quand les migrants se noient par centaines en méditerranée. Quand la foret flambe aux quatre coins du monde et que le Groenland fond en larme de glace.

    Les valeurs qui organisent le quotidien s’opposent quand on est citadin d’une grande métropole ou quasi abandonné au cœur du Larzac ou autour du Mézenc. Vélo contre voiture, produits sains contre petits prix, grands voyages ou petits pas en pleine nature. La terre tourne et le monde change à grands pas. La peur, la grande peur du changement s’installe au cœur de bien des gens. L’éros n’est plus l’Eros et nous y reviendrons.

    La violence progresse de toutes parts, par la censure, dans les paroles, les réseaux sociaux et par les gestes. Encore 100 féminicides en 2020. Les droits des femmes, leur respect en tant que personne humaines à part entière régressent dans bien des parties de la planète. Que faire sinon constater que la génération d’hier n’est plus aux commandes. La schizophrénie sociale s’installe durablement entre les nomades numérisés, « nouveaux bourgeois » hérités d’un passé pas si lointain et un bas monde en pleine régression culturelle, qu’il soient adeptes des théories du complot, gilets jaunes, anti-vacs, anti-tout, anti-systèmes ou simplement désocialisés, en survie alimentaire : tous les précarisés. Et comme l’écrivait si justement Lévi-Strauss, il n’existe pas de sociétés primitives mais des sociétés précarisées par d’autres plus puissantes, hégémoniques.

    De l’amour, du bonheur et du sexe

    Ces 3 trois personnages avec leurs contraires haine, malheur et violence mènent la danse du monde ; ils valsent, s’entremêlent et s’associent parfois. Tout évolue, nous l’avons vu précédemment. Leurs contextes changent et les pas de danse aussi.

    Le premier l’amour est le roi de nos cœurs. Il induit le second, le bonheur. Autant l’amour est une évidence quand il nous traverse, autant il est bien difficile à mettre en mots et à communiquer les émotions et sentiments qui le nourrissent. Comme le temps qui passe, une évidence intuitive, le temps, l’amour, restent des concepts bien difficiles à discerner. La perception subjective est si prégnante. La littérature et la poésie en son les plus sensibles et pertinentes approches.

    Mais à quoi bon défendre ce pauvre Woody, quand cette même agora de l’élite cinéphile a couvert d’or cannois un film certes de haute qualité mais que j’ai trouvé abject : Titane. Comment une réalisatrice, des acteurs excellents, multiples fonds de financement et le jury cannois peuvent mettre autant d’énergie à produire et à promouvoir une telle réalisation ? Je n’ose user du terme « œuvre ». En fait on voit bien ici que le « beau » et le « bien » doivent laisser la place à « l’utile » et au « nuisible ». Et Titane relève plutôt de cette dernière valeur.

    Ce film, dans l’esprit du public doit laisser maints cauchemars. Il est du même tonneau que ce que par ailleurs on rejette, le fanatisme du djihad et des talibans par exemple. Mais comme le dit si bien Morin, c’est parfois du pire que peut surgir l’inattendu salvateur et advenir d’une oasis épargnée, le cœur frais et enchanteur d’une nouvelle « personne humaine ».

    1. Avatar de Daniel Bougnoux

      Oui cher Jean-Claude, nous avons vous et moi le sentiment de ne plus être « dans le coup »… Mais ce n’est pas la morale qui change, mais plutôt les moeurs, à ne pas confondre ! Défendre un Woody innocent des crimes qu’on lui impute me semble relever d’une prescription universelle, hélas non partagée par les enragées de Metoo… Que faire contre l’aveuglement quand il ne veut pas s’informer ? Je n’ai pas vu Titane, cette Palme d’or est sans doute comme on dit un marqueur de société, à voir donc comme un document des changements en cours ? Mais avec vous, je place la qualité d’un film un peu au-delà de ces fameux « marqueurs »…

  11. Avatar de Kalmia de Lille
    Kalmia de Lille

    Bonsoir!

    Dans un monde qui perd ses marques et où c’est de plus en plus dur de rester soi-même avec les autres et la nature, à qui se fier?

    Je pense à Monsieur Serres, écrivant dans « Le Tiers-Instruit » :  » Résistez aux médias, aux médailles et cherchez ce que vous êtes… »

    Aujourd’hui, 3 août, une page entière est consacrée à bibi (Série Littérature Été 2021)

    Que peut retirer le lecteur du journal de tout ça? De mon petit « moi » répandu? RIEN.

    Et si quelque part cette parade haute en couleur dit « quelque chose », c’est ailleurs que ça se passe et non dans du papier de journal qui va tomber dans les oubliettes, mes bons amis.

    Cet ailleurs m’intéresse vraiment…Mais dans quelle « Tribune de l’ailleurs » trouver de quoi nourrir notre être?

    Bonnes gens, relisez, oyez le finale de Monsieur Jean-Claude, ce jour :

    « Mais comme le dit si bien Morin, c’est parfois du pire que peut surgir l’inattendu salvateur et advenir d’une oasis épargnée, le cœur frais et enchanteur d’une nouvelle « personne humaine ». » (Fin de citation)

    Cette belle envolée de croyance littéraire me rappelle la page 112 de « La philosophie des corps mêlés » de M.Serres où il n’attend pas une nouvelle « personne humaine » mais un dieu inattendu.

    Hélas, Messieurs Dames, ces belles paroles oxymoriques dignes d’un conte de fées, ne sont qu’une abstraction prophétique!

    Si tant est qu’existât vraiment cet ailleurs – habité ou non – il faudrait pouvoir le localiser avec des comptes de faits d’une implacable rectitude.

    Il y a du fantomatique dans les propos cités de M.Jean-Claude et de M.Serres et ce quelque chose n’est pas palpable ou « haptique », comme disent les savants.

    Je connais un exorciste, estimable personne de l’université, au cœur frais et enchanteur qui, avec son « Esprit de sel » pourrait, peut-être, bouter l’ectoplasme, hors de nous, de nos fors intérieurs titaniques, en proie à toutes les dépressions et convulsions. Je me suis permis, un beau jour, de réciter sa prière, dans la grand-messe consacrée à ce cher Edgar, ici même en ce blogue formidable, mené par quelqu’un de bien.

    A l’août revenu, point de bise en vue mais une petite brise légère qui saurait accompagner les violons du bal pour les accordailles inespérées des travailleurs de la preuve avec les maîtres du rêve…Illusion, mirage? Je ne sais répondre, je n’ai vu ni écouté la météo du Musée des sciences et en tel espace, autant ne pas faire de vagues et se contenter tout simplement d’icelle qui danse en nous.

    Kalmia de Lille

  12. Avatar de Jean Claude
    Jean Claude

    Merci Daniel de permettre tous ces débats d’idée. Non adeptes des réseaux sociaux ni des phrases ou idées courtes, il nous faut du temps et de l’espace pour partager nos pensées via des langages et des langues mais qui les maltraitent ou les réduisent de toute façon.

    Je ne peux qu’approuver vivement les propos de mon illustre homonyme. Pourtant que croire et à qui se fier ? Ne peut on rien trouver d’utile à la réflexion ? Alors à quoi bon écrire sinon pour jouer de l’esprit fin et des bons mots ou anagrammes?

    La « nouvelle personne humaine »

    Tel n’est pas mon chemin. L’homme est-il libre ? Ce n’est pas la bonne question nous dit Spinoza. La question pertinente serait toujours selon lui : comment accroître ma liberté ? Une liberté responsable, ouverte et créative. Abstraction prophétique ou chemin de vie ?

    La « nouvelle personne humaine », clin d’œil au surhomme de Nietzsche, invite à la transfiguration, à la métamorphose. Cependant cet autre illustre philosophe pensait encore en « dualité » l’homme et la femme. Que chaque sexe aille au bout de sa singularité pour se confronter et développer l’autre sexe. Comment sortir des représentations mentales arborescentes telles que celles qui ont fait la renommée de Gaston Bonnier dans la Nouvelle Flore (1926) ? Comment « se libérer du connu » ?

    D’une approche bien plus modeste et certes très influencée par notre icône encensée dans ce blog et si bien exprimé par notre cher randonneur, la « nouvelle personne humaine » pour devenir solaire se doit d’être multipolaire dans sa façon de représenter le monde et de l’implémenter dans son quotidien. Pour bien comprendre mon propos, il faudra s’imprégner du tome IV de la Méthode, le plus difficile il est vrai, de notre cher Edgar Morin.

    Mettre à distance de l’esprit, dualisme (ontologique ou méthodologique), arborescences, causalités directes, frontières, etc…. Penser et agir en complexité invite à plus de discernement, de multipolarité, à conjuguer avec des représentations mentales holographiques, dialogiques, fractales paradoxales, etc : reliance, porosité, systémique. La « nouvelle personne humaine » provient alors d’une représentation arbitraire constituée de quatre pôles, seize sous pôles, voire soixante quatre pôles élémentaires, tous en interactions. La forme géométrique de base pour aider l’imaginaire est le tétraèdre : quatre pôles à équidistances et en interactions. Oh je sais, l’exercice est bien déroutant. Mais dans ce cadre de pensée, par exemple, le sexe n’intervient que pour un petit seizième de ce qui caractérise une personne. Et l’amour se situe pour moi, dans un autre sous pôle bien éloigné de ce dernier ! Mais quelles serait chers lecteurs, vos représentations mentales multipolaires, de vos propres singularités humaines, arbitraires évidements !

    Choisir sa vie, c’est choisir sa façon de se représenter le monde, d’en vivre et d’en témoigner autant que possible dans des discussions profondes, bienveillantes (Cf. Théodore Zeldin) avec patience, audace et humilité. Il n’y a ni implacable rectitude, ni croyances littéraires mais effort, persévérance, incertitude, incomplétude, échec, expérimentation et acceptation de l’inattendu, ce qui est propre aux multiples catastrophes-métamorphoses que traverse notre société comme chacun de nous.
    Mon commentaire

  13. Avatar de Jacques
    Jacques

    Beau et difficile commentaire de Monsieur Jean-Claude.

    Comment lui répondre en ce jour de Transfiguration chrétienne?

    De quel Mont Thabor ou Analogue faire passer une petite lumière qui puisse nous éclairer sur notre chemin de randonnée?

    J’aimerais apporter une petite précision concernant la référence à M.Serres de Mme Kalmia.

    C’est à la page 96 et non 112 du livre mentionné que se trouve la citation :

    « Le dieu que j’attends est inattendu, s’il vient le reconnaîtrai-je? Je n’entends d’Esculape guérisseur qu’un nom ou une figure, que désignations et descriptions, je le connais trop déjà, il ne me guérira pas »

    Et à la page 112, on peut lire : « Je cherche une science belle. (…) Sort le savant, voici l’enfant. »

    J’ai sous les yeux une épître d’un chercheur rationaliste (Monsieur Robert Dalian), lettre qu’il a bien voulu m’envoyer au sujet de cette « science belle », il y a quelques décennies. Critique acerbe du propos de M.Serres.

    Hier, juste avant de lire le commentaire du jour de M.Jean-Claude, je reçois un message d’une amie qui pose la question :

    « J’aime écrire sur des personnages que l’on ne pourrait inventer tant ils paraissent hors de la vie. Je ne suis pas sûre que ces récits puissent susciter quelques questions mais si c’était le cas, Il me semble que l’interrogation que j’aurais aimée me voir adresser serait celle-là : À quoi bon écrire sur les hommes ? »

    Et le même jour, je reçois de l’auteur de « La transfiguration du politique », un petit commentaire sur une phrase à paraître dans son prochain livre :

    « En des temps les plus discordants, seuls les amants et les sages savent dérober au monde l’intensité de l’instant. Amour et méditation permettent de vivre cet instant comme une goutte d’éternité. »

    Enfin, en cette vigile de transfiguration chrétienne, je retrouve ma cognée, par hasard, égarée depuis des semaines dans les herbages d’alentour.

    Ainsi va la vie…avec sa part d’étonnement.

    Mais revenons à nous et au très beau verbe utilisé par M.Jean-Claude : Implémenter.

    Ce n’est pas tous les jours qu’on entend un mot pareil. Quèsaco? Ce terme du domaine informatique nous incite à aller refaire un tour du côté de chez Edgar où se dessine l’écologie des idées, là où le méga-ordinateur et notre computeur personnel ont voix au chapitre de la polyphonie et polylogique cognitive.

    A l’heure des effondrements symboliques, faut-il vous raconter?

    Auteur de « La crise de la représentation », notre icône des randonnées n’a pas besoin d’explications, ni de langage fleuri et de moult anagrammes.
    Alors, Mesdames et Messieurs, sur nos tables déployons nos portulans, chaussons nos bésicles et plaise au ciel des idées qu’une pesanteur médiumnique sur quelque lieu s’exprime!

    Une figure du dehors enfin transfigurée, chimère ou sirène?

    Faut-il la localiser dans l’éclat nietzschéen où la puissance intervient et agit par quanta quand le principe de Salomé a voix au chapitre d’une contradiction envenimée?

    Comment fonder le nietzschéisme du féminin, Monsieur Jean-Claude?

    Notre cher Monsieur Daniel de Lyon qui connaît comme sa poche le cas du K2 a bien raison de mentionner la question de G.Bachelard dans son projet d’invention du masculin.

    Quant à sa transfiguration, un livre suffira-t-il?

    Très bonne journée à vous tous, lectrice et lecteur de ce blogue.

    Jacques

    Donné le six août deux mille vingt et un

  14. Avatar de Kalmia
    Kalmia

    Renvoi de mon commentaire avec les corrections qui s’imposent.

    J’ai laissé des fautes dans le premier envoi de ce matin et je sais qu’en ce blogue, on ne rigole pas avec ces impolitesses.
    Mille et une excuses!

    Merci à Monsieur Bougnoux de bien vouloir prendre en considération ce nécessaire correctif

    Bonjour !

    Juste quelques mots sur le dernier commentaire, si intéressant, de Monsieur Jean-Claude.

    Je me permets d’extraire cette phrase qui me semble riche d’un sens profond :

    « Mais quelles serait chers lecteurs, vos représentations mentales multipolaires, de vos propres singularités humaines, arbitraires évidements ! »

    Cette phrase exclamative n’est pas une question mais elle n’en recèle pas moins une charge interrogative qui ne peut laisser indifférents les lecteurs.
    Il y a en telle construction un singulier pluriel (serait) qui transfigure l’abandon kénosique (évidements)

    Elle appelle le détachement, l’écart et c’est bien en ce lieu « retiré du monde et de ses vaines et éphémères glorioles » qu’il peut se passer quelque chose…

    Du singulier au pluriel, du je au nous, de la kénose à la plénitude.

    Une saine curiosité nous permet d’entrapercevoir par le trou de la serrure de quelque recoin banal la robe au couleur du temps.

    La grammaire est une chanson douce et le cœur aventureux se plaît à revivre les images de son album d’enfance, par un joli compte de faits.

    Pour le physicien qui s’attache à « l’aurore grelottante en robe rose et verte », il est une orientation assez subtile de la pensée qu’il nomme « la croyance littéraire »

    Icelui de préciser que si telle croyance entraîne l’adhésion, c’est par un mouvement de l’esprit que le penseur doit scrupuleusement se garder de vouloir systématiser.

    Du pôle Nord au pôle Sud « la fine lingerie » reste « légère à l’infini » par la transposition exacte de ses lettres, Monsieur Jean-Claude.

    Et si en quelque adytum, le tissu revêt de l’importance, c’est parce qu’il a son dictionnaire et ses lieux bien réels pour se laisser dévoiler sans dévoiler.

    Pour l’heure, fût-elle celle de s’enivrer, on parle dans le poste d’un champion qui coûte des millions et des millions et les commentateurs d’applaudir !

    A quand une sacrée Tribune qui va droit au but pour des lecteurs sans ballons rouges ?

    Bien à vous

    Kalmia de Lille

  15. Avatar de Jean Claude
    Jean Claude

    Un peu d’abstinence numérique pour tutoyer (en VAE !) le mont chauve permet de prendre la hauteur nécessaire au débat. Et voila que notre randonneur ouvre un nouveau questionnement sur cette fameuse nécessité de débattre.

    La pluralité du singulier c’est-à-dire, en ce qui nous concerne, la pluralité de chaque singularité habite tout le vivant. Souvent une pensée littéraire mais surtout la poésie et le haïku permettent de créer l’écart qui invite à percevoir l’indicible. L’entorse à la règle, l’erreur grammaticale, la dissonance musicale et l’indiscipline contenue aussi laissent dévoiler sans dévoiler.

    Mais voila pour débattre il devient nécessaire d’objectiver et surtout de discerner plus finement « l’inouï ». Débattre d’une idée, d’une théorie bien formulée en science, entre pairs coule de source : collège de pairs, langage commun, confrontation d’arguments, etc. Cela va de soi. Dans le champ du politique, de la démocratie, les choix ne sont plus d’ordre scientifiques mais stratégiques et donc complexes, portant en leur sein, incertitude, incomplétudes, doutes et paris.

    Les approches multipolaires, systémiques et complexes qui décrivent la réalité de chacun ne peuvent plus être débattus par simples confrontations d’arguments. C’est trop réducteur. La discussion profonde implique que chaque partenaire intègre au mieux les « systèmes d’idées organisées » que chacun porte dans sa pensée et communique difficilement par les mots. Cela demande de la patience, de l’intériorité, de l’effort et du doute. Avant de vouloir argumenter, il devient alors indispensable de questionner, d’entrer autant que possible dans le monde de l’autre. La pratique d’une écoute profonde, ici plutôt dans le champ de la cognition, exige de la compétence en la matière.

    Pour en revenir à nos moutons, ceux issus de la « tribulation d’une tribune », vous me demander cher Jacques « Comment fonder le nietzschéisme du féminin ? ».

    Je ne peux le faire, comme développer ci-avant. Ce qui est en mon possible c’est de décliner par parties ou exemples, ce qui constitue mon propre « système d’idées » organisé de quadripôles en interactions. Comment penser le « féminin » autrement qu’en l’opposant au « masculin » ? Le féminin serait ce qui est propre aux femmes, qui leur est destiné, qui ressemble aux femmes. Comment sortir de ce dualisme implicite sinon en supprimant ce terme et en essayant de définir les caractéristiques sources. Un visage d’homme peut être féminin. Une femme russe, athlète du lancé de marteau n’a guère de féminité dans son allure. En contre exemple, l’himalayiste drômoise Elisabeth Revol dont l’allure est « féminine » dans notre culture occidentale, dispose d’une virilité et de ressources de survies hors du commun et que peu d’hommes au monde peuvent égaler.

    Sur un autre plan, regardons la sexualité qui est déterminé génétiquement à la naissance. Chaque personne va développer une attirance sexuelle singulière et peut être un peu conditionné par l’environnement culturel, peut être aussi évoluant au court de la vie : asexuel, homosexuel, hétérosexuel, bisexuel. Cela peut aussi être exprimé avec plus de discernement entre les sensations de tendresse, de sensualité, de sexualité, d’érotisme et aussi de déviances moins usuelles. Ces termes, en fait, sont au service de pouvoirs de dominations et inscrits dans une culture donnée. L’homosexualité était considérée comme une maladie. Elle l’est encore dans certains pays. Alors doit on considérer que chaque personne humaine, indépendamment de son sexe génétique initial, peut développer de multiples facettes en fonction des contextes : féminité, virilité, attirance sexuelles, attirances sensuelles, attirances intellectuelles, attirances esthétiques, charme relationnel ou encore douceur, dureté, générosité, narcissisme, souci de soi, souci de l’autre, etc.

    Quel serait alors le marqueur déterminant à inscrire sur la carte d’identité pour identifier la personne ? On pourrait remplacer le sexe par intensité de la libido, taille de l’égo, faculté relationnelle, attirance sexuelle, attirance religieuse, attirance complotiste. De toute façon, et bientôt, toutes ces informations et bien plus, seront disponibles sur la toile.

    Pour en terminer avec les exemples, déclinons le concept « amour » qui trop souvent en cas de conflit conjugal se réduit à « il ne m’aime plus » ou « je ne l’aime plus ». Mais qu’est-ce à dire ? L’amour peut être décliné en ce quadripôle (qui reste arbitraire) : Désir – Amitié – Passion – Don de soi. La convention peut être de considérer que si l’un des pôles est absent, la relation n’est plus de l’amour véritable. Il nous faut encore décliner chacun de ces quatre pôles.

    Le « désir » peut être sexuel, sensuel, parental (avoir des enfants), sécuritaire, valorisant, être sûr de plaire, d’être « aimable ». Le plus souvent il est multipolaire. « L’amitié » va se décliner en plaisir d’être ensemble, de « faire » ensemble, de construire des projets de vie, de confidence, de confiance mais aussi de déviances comme le contrôle, l’emprise, l’assujettissement, la possession. La « passion » peut être partagée ou non, dévorante voire maladive ou seulement celle d’un appétit de vivre. Et enfin le « don de soi » peut être inconditionnel comme l’état de grâce, le don négocié (don contre don), l’engagement pour le meilleurs comme pour le pire, le juste équilibre entre le soucis de soi et le soucis de l’autre. Il peut être aussi celui du sacrifice, de la culpabilité. De quoi parle t-on quand on parle d’aimer ?

    Voila un chemin possible pour enrichir un débat, avant d’argumenter : apprendre à connaître l’autre, ce qui implique de vouloir un peu l’aimer, le percevoir aussi comme son semblable, qu’il soit mâle ou femelle, viril ou féminin, chrétien ou athée, etc. Cette disposition engage un cercle vertueux qui nous mène vers la communication non violente, assertive et surtout non consensuelle. Elle valorise les différences et les singularités.

    Bonnes réflexions à vous tous
    Jean Claude

  16. Avatar de Kalmia
    Kalmia

    Bonjour en ce jour d’Assomption, fête chrétienne et jour férié en république française!

    Ce dernier commentaire de Monsieur Jean-Claude est bien sûr de toute beauté.

    Peut-on en discuter, en débattre sans froisser la robe au couleur du temps?

    Je ne sais exactement mais on peut toujours essayer…

    J’ai porté ce commentaire sur une aire de paroles singulières où notre randonneur, peut-être, stationne et rêve.

    La réaction ne se fit pas attendre :

    Le 14/08/2021 à 10:49, Guillaume B… a écrit :

    « Bonsoir

    Un bien beau texte en effet, qui pèse son équivalent de sanglots et de grâces, Toujours dans l’avenir ouvert, couvé sous le soleil, Écrit sur le front de cet enfant qui pose un bâton sur une pierre emergeante d un lac de montagne. Noyé dans la lumière, jeune mesureur du silence, Croisé avant-hier sur un chemin de montagne. » (Fin de citation)

    Et l’animateur de cette excursion en telle zone industrieuse, de faire suite incontinent :
    « On aimerait que Monsieur Blanvillain, inspiré de juste mesure – platonicienne, évidemment – et aussi d’un poème de Virginia Woolf qui sert d’introduction à la causerie de Monsieur Luminet sur la gravité émergente, nous raconte une petite histoire de son univers qui n’a pas besoin d’explications. A-t-il vu, un beau jour, issir d’un lac obscur, une reine ignorée dont le physicien d’aujourd’hui, nous dit qu’elle est constituée d’une noire énergie?

    Merci infiniment.  » (Fin de citation)
    Que va répondre l’auteur de « L’impensable immensité de l’infini » qui, d’après la présentation, entreprend depuis et pendant
    plusieurs années une recherche qui s’est révélée basée sur une logique à la portée de tous, correspondant à la réalité et non sur des équations mathématiques avec des formulations compliquées et sans solutions simples ?
    Le physicien qui aime les Muses, dans l’espace de cette fenêtre, lui a répondu, il y a quelque temps, par la réplique du commissaire Antoine Bourrel :
    « Bon sang, mais c’est bien sûr! »
    Dite dans « les trois premières minutes de l’univers » par un commissaire du double plan, la réplique eût-elle changé la face de notre vieille terre?
    Brisons là.
    Sur la robe chamarrée de pierres précieuses, étalée sur le blogue de La Croix, par Monsieur Jean-Claude, il en est une qui brille plus que les autres.
    Une perle rare, un mot : L’inouï.
    Et c’est chez le lapidaire François Jullien que nous allons, de ce pas, avec la permission de notre maître randonneur, découvrir la bijouterie.
    Dans l’écrin présenté, cette citation :
    « Il n’y a rien à attendre d’autre, en effet, d’un autre monde, mais à entendre l’Autre émergeant singulièrement dans le monde, à l’orée du monde, et débordant celui-ci de sa propriété et de sa détermination opaques. C’est lui alors, en effet, dans cette aube qui est la « Déesse ». L’Autre alors n’est plus l’inconnu d’un en soi retranché du monde, mais celui qui entrouvre ce monde, cette vie, à la révélation de l’inouï. »
    A propos du projet philosophique de la communication de M.Serres, M. Pierssens écrit justement :
    « Une poésie de la langue et une poésie de la communication, une poésie de la culture et du sens et une poésie de l’Inouï (…) mêlées (…) confrontées (…) , produisant des singularités hétérogènes qui font événement. »
    Monsieur Jean-Claude est en tel jardin, l’Hermès de M.Serres. A quand la métamorphose de la statue de bronze en visage souriant?
    Pour ne rien vous celer, chers amis du blogue, je donne ma langue au chat perché sur l’arbre d’à côté.
    Kalmia

  17. Avatar de Cécile d’Eaubonne
    Cécile d’Eaubonne

    Merci pour l’invitation de Kalmia de poursuivre ces dernières discussions en haut d’un arbre perché. Mon voisin y a construit une cabane pour ses deux fils : un lieu magique aux couleurs de leurs rêves …
    Moi, j’y emporterai un ou deux haïkus qui parlent “d’inouï “ … et les croquis du cher Paulus qui se moque des “singularités hétérogènes” du monde d’aujourd’hui.
    La mère des garçons me souffle à l’oreille qu’ils ont déjà préparé un gâteau -yaourt pour l’heure du goùter. Je suis invitée aux libations … Coca-cola ou jus de fruits ? Je ne peux hésiter !

    La vie est belle dans l’arbre perché. Mais, attention … à ne pas se rompre le cou et les méninges.

  18. Avatar de Gérard
    Gérard

    Merci à vous, Madame Cécile, Madame Kalmia pour vos commentaires de ce billet si intéressant.

    Connaissant votre élégance d’esprit, je n’oserai sûrement pas vous accompagner au jardin d’Alice.

    Ours mal dégrossi, je ne saurai aller de ce pas questionner le chat de Cheshire, mais son souris m’interpelle.

    Peut-être dans l’arbre aux enfants, à proximité de votre logis, avez-vous compris quelque chose au delà des singularités et des subtilités intellectuelles, qui puisse éveiller la curiosité du passant…

    Je lui donne bien volontiers ma langue et je compte sur votre bénévolence pour me faire part de sa réponse à ma question sur la direction que je dois prendre, pour aller quelque part en cette si lointaine contrée.

    D’avance, je vous en remercie.

    Bien cordialement

    Gérard

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À propos de ce blog

  • Ce blog pour y consigner mes impressions de lecteur, de spectateur et de « citoyen concerné ». Souvent ému par des œuvres ou des auteurs qui passent inaperçus, ou que j’aurai plaisir à défendre ; assez souvent aussi indigné par le bruit médiatique entretenu autour d’œuvres médiocres, ou de baudruches que je…

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À propos de l’auteur

  • Daniel Bougnoux, professeur émérite à l’Université Stendhal de Grenoble, est ancien élève de l’ENS et agrégé de philosophie. Il a enseigné la littérature, puis les sciences de la communication, disciplines dans lesquelles il a publié une douzaine d’ouvrages.

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